Pshiiit

Oblikë, Albanie, à quelques kilomètres du poste frontière, le samedi 6 mai
Temps de printemps idéal, soleil, 22° C. Il faut cependant penser à rajouter les degrés de la pente aux degrés Celsius pour plus de précision.
« Pshiiiiiiiiiwiiiiiiwiiiiiiwiiiiiiwiiiiiiwiiiiii »
Voilà à peu près le bruit que fait un pneu dit tubeless, c’est à dire sans chambre à air, lorsqu’il crève à cause d’un trou un peu trop grand. Normalement, cette technologie révolutionnaire est sensée reboucher naturellement les crevaisons communes. Beaucoup de cyclistes recommandent ce système comme des prêcheurs du nouveau monde, « tu ne crèveras plus jamais » qu’ils s’amusent à répéter en boucle. Sauf que si je sais le bruit que fait un pneu tubeless quand il crève, c’est que c’est exactement ce qu’il s’est passé aujourd’hui.
Nous roulions dans les hauteurs qui séparent le Monténégro de sa voisine l’Albanie, soleil radieux et vues magiques sur le lac de Shkodra. Très beaux dénivelés, les montagnes du coin sont encore jeunes. Toutes bien vertes, comme le reste du Monténégro d’ailleurs, pays que je renommerais volontiers Montéverdo. Chaque petit sommet est bien dessiné, très simple, comme plein de cônes renversées et disposés au hasard. La verdure des montagnes se répand dans le lac par des petites îles et marécages. La route panoramique n°3 qui nous conduit naturellement vers la frontière albanaise est impressionnante. Rien de mieux qu’une petite crevaison pour nous faire admirer un peu plus longtemps le paysage. J’étais derrière Dylan lorsque j’ai entendu le bruit provenant de sa roue arrière. La fuite se manifestait clairement par le petit spray blanc qui émanait du pneu à chaque tour de roue. Ce spray, c’est un produit visqueux et collant qui se balade en permanence dans l’intérieur du pneu et fait office de bouche-trou chimique. Dylan appelle ça du gunk, traduction du dictionnaire : magma infâme, on est pas loin de la vérité. J’ai trouvé l’idée de fourrer un ruban élastique dans le trou de crevaison pour colmater mais je n’ai pas insisté pour son application. Finalement cette réparation de fortune nous a permis de terminer la journée. Nous voilà en Albanie, encore un sacré changement de décor (ce sera pour le prochain épisode).
Cette semaine était plutôt concentrée en Croatie où nous sommes revenus après un passage à Mostar. Nous sommes restés plusieurs jours dans la ville de Dubrovnik, dernière forteresse sur la côte croate avant que le relais soit pris par le pays suivant. Cette pause fût très plaisante, surtout grâce à Briony qui est venue me rendre visite. Nous avons exploré sans relâche les quatre coins de l’ancienne Raguse, cité-état bien fortifiée et très bien conservée. Si bien conservée d’ailleurs qu’il faut y mettre le prix. Tout y est cher, qu’il s’agisse de l’accès aux sites historiques que de tous les commerces. La devise de Dubrovnik : « La liberté ne se vend pas même pour tout l’or du monde ». Les croates ont bien le droit de pratiquer leurs prix excessifs, mais il faut être un riche touriste pour être libre de visiter la ville comme on le souhaite.
Peu après Dubrovnik, nous avons repris nos vélos pour la ville-fortifiée suivante : Kotor au Monténégro. Cette ville mais surtout sa baie, sont splendides. Surtout que la météo s’était stabilisée sur un temps magnifique. Kotor c’était aussi le point de départ de notre incursion dans l’intérieur des Balkans. Nous laissons la Méditerranée momentanément pour nous frotter au relief très mouvementé de cette région. Le pneu tubeless de Dylan tiendra-t-il jusqu’à la Macédoine ? On fait le point dimanche prochain !
A+
















